Tw : perte d'être cher, dépression (mention)
Les gens aiment les histoires. Pourtant les seuls qui les réclament vraiment sont les enfants. Des histoires inventées, des contes, des livres d'aventures.
L'histoire de cet homme est plutôt simple. Il est né à New-York, sans être enfant unique, il n'avait qu'un grand frère. Ses parents n'avaient pas spécialement les moyens d'élever plus d'enfants, mais ils auraient voulu en avoir une dizaine, racontaient-ils toujours, dans leur jeunesse.
Sportif, Harry l'a toujours été, comme Franck, son aîné. Si l'un a préféré des études scientifiques, l'autre s'est vraiment donné à fond pour entamer une carrière sportive. S'il aimait pratiquer des activités physiques, il n'avait pas nécessairement dans l'idée de devenir un champion de haut niveau, non, lui ce qu'il voulait c'était voir les autres briller, d'avoir la satisfaction d'avoir permis à une vie de briller.
C'est d'ailleurs en accompagnant un de ses « jeunes » protégés qu'il l'a vue pour la première fois. Dieu qu'elle était belle et elle paraissait si heureuse. Elle et sa famille.
Ca lui a fait un coup au cœur tant cette femme lui avait paru éblouissante. Harry en a rapidement parlé à son aîné et ce dernier lui a gentiment rappeler que convoiter une femme mariée ce n'était pas très bien. Sans réussir à se la sortir de la tête le destin les a de nouveau mis l'un sur la route de l'autre peu avant ce tragique événement du 11 septembre 2001. Si pour beaucoup ça n'a été qu'une annonce, un fait de grande ampleur mais sans impact sur leur vie, pour Si-Woo et lui ça a été tout autre. Déjà, la femme devint veuve. Puis ils se retrouvèrent, plusieurs fois et en voyant sa mine grise et triste, Harry l'approcha pour lui parler.
Une épaule sur laquelle pleurer loin des enfants est toujours pratique. Pendant plus d'une année ils sont restés simples amis, passant juste de bon moment autour d'un verre ou d'un café à bavarder. Peu à peu Harry la voyait de nouveau sourire, l'entendait rire même et il n'y avait rien au monde qui aurait pu lui faire plus plaisir, sauf peut-être partager sa vie.
Sa vie d'ailleurs, il l'a partagé après deux ans de patience et de persévérance, jurant à Si-woo que ses enfants étaient dors et déjà les siens même sans les connaître. L'emménagement se fit en quelques temps : d'abord il venait dormir, appréhender ce petit monde, puis au bout de quelques mois, vue le besoin de la mère de famille de se rapprocher des siens, de sa sœur en l’occurrence, et que leur métier le permettait, ils ont décidé d'emménager à Whitebridge.
Si ça n'a pas été toujours simple pour Harry de se faire une place auprès des enfants mais il ne s'est jamais découragé, cherchant toujours à faire le premier pas vers eux pour mieux les comprendre et leur montrer que, sans remplacer leur père, il serait pour eux un second papa.
Le plus compliqué à convaincre de le laisser avoir une place dans leur vie fut Moon. Si cela ne l'étonna pas, Harry a redoublé d'effort envers le jeune homme, lui offrant tout ce qu'il pouvait, sans jamais les mettre à mal financièrement, au niveau de ses passions des jeux vidéos.
Cette nouvelle vie à Whitebridge leur promettait d'être belle.
Normalement.
Alors que tout semblait aller pour le mieux, même si Si-woo avait bien du mal à accepter l'orientation sexuelle de Moon, pour Harry, du moment qu'il aimait et était aimé en retour, ça ne lui posait aucun problème, quelque chose dans la roue du destin tourna. Le vent se fit orageux bien que ce devait être l'annonce d'un événement heureux. La fin 2018, année de conception de la future Astrid qui naîtrait en 2019, mit en lumière le cancer de Si-woo. Un coup dur pour le couple et si la survit des deux êtres qu'il aimait était la priorité, il comprenait aisément que sa femme choisisse la vie de leur enfant avant la sienne.
Harry fut son complice dans la réalisation de nombreuses vidéos, en particulier pour les anniversaires de leurs enfants et de leur futur bébé. C'était un poids lourd sur ses épaules, parce qu'il ne pouvait pas accabler les enfants de ses doutes, de son envie de sauver sa femme, de son envie de tout foutre en l'air et de s'enfermer dans le déni le plus total concernant l'état de santé fragile de Si-woo.
La grossesse se passa bien, la petite Astrid pu voir le jour dans de bonnes conditions. Retour glacé quant à l'évolution du cancer. Métastases. Il fallait profiter d'elle avant qu'elle n'aille rejoindre les anges et ses ancêtres.
C'était beaucoup trop tôt.
Les derniers mois furent les plus douloureux pour Harry qui, toujours, se voulait fort pour leurs enfants et ne laissait rien passer, encore moins alors qu'il devait prendre soin de la petite dernière. Mais lorsque plus personne n'était autour de lui, il relâchait la pression dans un verre de rhum qui manquait parfois d'être salé de ses trop nombreuses et silencieuses larmes.
Comment allait-il faire maintenant sans elle ? Il n'avait jamais eu a gérer une famille entière seul. Même s'ils étaient tous grands, sauf leur petite sœur, l'entraîneur sportif ne voulait pas élever leur fille sans sa mère.
Il était présent lorsqu'elle a rendu son dernier souffle de vie, lui faisant promettre, comme tous les jours, de donner les vidéos aux enfants à leurs anniversaires, pour Thanksgivin, pour Noël et le Nouvel an et quand ils auraient un trop gros coup de blues aussi.
Si ses enfants étaient grands et vaccinés à part la petite Astrid, s'ils avaient quittés le nid familiale, ils avaient tous toujours leurs chambres et la porte leur était toujours ouverte. C'étaient les mots qu'avait eu besoin de leur laisser entendre Harry. Ils étaient chez eux ici.
La maison lui paru bien vide à la mort de Si-woo malgré la présence de leur petit bout de chou. Si elle demandait beaucoup d'attention, s'il avait pu négocier pour pouvoir l'avoir quelques fois au boulot et ne pas la laisser constamment à la surveillance de Moon, bien qu'il lui soit infiniment reconnaissant de la garder régulièrement et lui permettre de souffler, sa femme lui manquait atrocement.
Si Harry n'avait jamais pris la peine de parler de sa douleur, ses traits tirés et son regard parfois perdu dans le vide n'avait sans doute pas du passer inaperçu aux yeux de certains de ses enfants. Il l'avait aimé comme un fou, il l'avait aduler comme sa déesse et maintenant qu'elle n'était plus là, qui le guiderait ? Lui qui est incapable de se souvenir qu'il avait un truc à faire sans le noter sur son planning ?
Au dessus de ça, il pouvait compter sur quelques amis pour le soutenir. S'il n'avait pas le cœur à parler de sa femme, son décès est trop récent pour lui, il adorait par dessus tout parler de ses enfants. Qu'il en était fier de ses enfants. Il n'y avait pas un jour sans qu'il ne leur rabâche les oreilles avec, collègues ou amis. Ce n'était pas compliqué, en fond d'écran sur son téléphone trônait une photo de sa petite famille au complet quand sa femme était encore bien physiquement.
Si au début le verre de rhum était ponctuel, il devenait régulier accompagné d'un disque de jazz. Un verre tous les soirs, jamais plus toutefois. Harry ne supporterait pas de tomber dans l'alcoolisme. Il avait encore des obligations et il comptait bien les honorer, quitte à y laisser quelques plumes au passage, mais il savait aussi qu'il pouvait compter sur ses enfants pour le relever. Il ne fallait pas grand chose, juste qu'il puisse les voir et parler un peu avec eux, savoir qu'ils allaient bien, qu'ils ne manquaient de rien.
Un peu papa poule et papa gâteau, il avait bien du mal du mal à dire non à l'un de ses enfants du moment qu'il pouvait le faire et pour Astrid c'était pire encore. Elle le menait facilement par le bout du nez, sans en avoir forcément conscience vue son jeune âge.
Sans mettre entre parenthèse son travail pour assurer un avenir confortable à ses enfants, Harry avait choisit de diminuer son temps disponible, diminuant ainsi par la même son salaire tout en veillant à pouvoir subvenir à leurs besoins et continuer de payer la maison.