Misha Savage | Un mec rentre dans un café

Quoi de mieux qu’un bon film d’horreur pour mieux dormir la nuit ! C’était un moyen un peu original de Misha pour réussir à trouver le sommeil. Tranquillement installé dans son canapé convertible, Mr.Croquette sur les genoux, ronronnant aussi fort qu’une tondeuse à gazon, Misha regardait un vieux slasher plus comique que terrifiant. Le tueur avait eu une vie compliquée, une mère aimante, mais clairement dans la merde et un beau-père aussi violent que toxique. Cette vision fit sourire le spectateur…

- Si toutes les personnes qui ont eu une enfance de merde doivent devenir de dangereux psychopathes, je devrais m’y mettre maintenant.

- Miaou…

Mr. Croquette, le chat qu’il gardait pour quelques semaines, l’observait d’un œil ensommeillé. Misha prit ça pour une invitation à raconter sa vie. Depuis quand ne l’avait-il pas fait ? L’avait-il au moins déjà raconté… Même ses amis les plus proches ne connaissaient pas son histoire. Puis Mr.Croquette ne pourrait que miauler son histoire si l'envie lui prenait d’aller cafter et, a par si les maîtres avaient fait Miaou LV1, il doutait sincèrement que quelqu’un ne découvre ses secrets.

- Mon père était un connard fini, violent et alcoolique. Un peu comme ce gars-là. Beauf à souhait, option grattage de couille devant un match de baseball. Il nous défonçait ma sœur et moi, dès qu’il avait trop bu, tout le temps quoi. Le pire, c’est qu’il était flic... Mais ma mère n’était clairement pas mieux. Pas de câlin, pas de tendresse ni de mots pour nous soutenir. Elle était plutôt du genre à nous dénoncer pour un oui ou un non à notre père pour qu’il nous fout une raclée.

- Miaou…

Misha eut un petit rire, aucune tristesse ne paraissait sur son visage. Depuis longtemps, il avait refoulé tout sentiment de peine, préférant garder son sourire et sa bonne humeur même si cela n’était pas toujours vrai. Un psy lui avait dit, un jour, qu’il avait fait une sorte de dissociation, ce que Misha ne trouvait pas plus mal.
Il gratta le chat entre les deux oreilles, amplifiant ce ronron assourdissant. Il devrait penser à prendre son propre chat un jour…

- Je suis arrivé à Red Hawk gamin, ma sœur avait à peine un an et moi pas beaucoup plus. Avant, nous étions au Canada, nous parlions français à la maison, parfois anglais. L’école a fait en sorte que je parle un parfait anglais. On pourrait croire que je suis intelligent quand je parle français.

Il y eut un nouveau rire venant de Misha, se prenant encore plus con qu’il ne l’était vraiment. Sa confiance en lui qu’il montrait à qui le voulait n’était en réalité qu' une couverture.

- Ma petite sœur est morte ici, à Red Hawk, sous les coups de mon père. C’est comme ça que mon père a fini en prison et ma mère la suivit très peu de temps après. Mon père a décidé qu’il n’irait pas seul, il a alors raconté que ma mère nous frappait aussi. Ce qui n’était pas totalement un mensonge, mais c’était plutôt la psychologie qu’elle aimait, elle. Tout devait tourner autour de sa personne, maquillé comme un camion volé, habillé comme une pute de bas étage et à parler constamment d’elle, d’elle et encore d’elle. Tout son malheur venait de nous et plus souvent de moi… Ouais, les capotes étaient en option dans le couple Savage. Deux enfants, mais six fausses-couches ! “C’est de ta faute Misha ! Tu m'as pété l’intérieur et regardes mon ventre ! ” Parce qu’on a dû l'ouvrir pour me faire sortir… Et encore, je suis né avec de l’avance ! La drogue, la clope et l'alcool, ça n'aide pas à tenir une grossesse jusqu’au terme. Mais c’était de ma faute d’après elle.

Meurtre sanglant à la télé, le tueur masqué venait de tuer une partie de ses geôliers. Peut-être aurait-il vraiment fini comme lui s'il avait eu une once de psychopathie en lui. Il cochait presque toutes les cases de l’enfance des tueurs en série, il n’avait juste jamais fait de mal à un animal.

- J'ai loupé de coche tueur en série pour devenir dealer et garder des chats. C'est moins classe mais je risque moins si je me fait chopper ! Imagine, je tue quelqu'un, je prend perpet' avec mon père comme copain de cellule... Je ne souhaite pas ça a mon pire ennemie. Et puis que ferais l'autre abrutit de Mendoza sans moi ! Il va devoir supporter sa sœur sans moi... Quel drame...

Le ronron laissa place à une respiration profonde et plus lente, Mr.Croquette dormait profondément maintenant. Misha s’installa mieux dans son canapé qui lui servait de lit, tout en essayant de ne pas déranger le chat installé sur son bas-ventre. Il doutait de trouver le sommeil après avoir raconté une histoire aussi horrifique à ce matou. Et effectivement, il ne trouva pas le sommeil cette nuit-là.